Depuis que tu es née, je n’ai plus de nuit

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témoignage par Léa Coquille, maman de Lola

Tu es arrivée il y a maintenant 15 mois, et quelle arrivée ! Le déclenchement a commencé le dimanche matin, à 41+3 ça donnait peut-être déjà le ton. Mais tu as pris ton temps et tu es sortie le lundi à 21 heures pétantes. Évidemment l’émotion, le soulagement, la joie, l’amour inconditionnel… Tout était au rendez-vous, mais ce n’est pas le sujet.

Voilà donc la première nuit qui commence de la plus belle des façons qui soit : la tétée d’accueil (bon en vrai, ta première action a été d’expulser ta première selle sur mon ventre mais on fera comme si ce petit détail n’était pas).

Revenons donc à la tétée d’accueil, la fameuse, la tant redoutée, celle qu’on ne sait pas si l’équipe soignante nous permettra de réaliser, celle qui peut déterminer la suite de l’allaitement, celle où on est à l’affût d’un éventuel frein de langue, celle où l’on supplie notre corps de donner un peu de lait rien qu’un peu, bref « LA » tétée à ne pas rater, à 21 h passée, après 38 heures de travail, 5 échecs de péridurale,
9 mois de grossesse, les conditions idéales quoi.

Mais la magie opère, comme ce qui est décrit dans les livres, tu te mets à grimper jusqu’à mon sein tel un (magnifique) petit primate qui sait ce qu’il a à faire pour sa survie. Tu tètes parfaitement, tu t’accroches au tété, un sein, une petite
pause puis l’autre. Nous voilà parties pour une merveilleuse aventure lactée.

Bon soyons d’accord, aventure aussi ponctuée de stress, de doutes, de jugements, accessoirement d’une hyperlactation, d’un REF (ce fameux réflexe d’éjection fort qui a fait rire ton papa, qui m’a appris toutes les positions Biological Nurturing et qui t’a valu quelques fausses routes), de mastites, d’une hospitalisation… Bref cette aventure est merveilleuse car ons’est battues, toi et moi pour la faire exister. Mais on s’éloigne du sujet. LES NUITS.

Depuis cette première nuit, eh bien les  autres se suivent et ne se ressemblent pas (car souviens-toi, ZÉRO règle avec un bébé) et pourtant je peux résumer comme ceci : tu tètes parfaitement, tu t’accroches au sein. J’ai choisi de te donner le sein à la demande (et tu l’as bien compris), j’ai choisi de respecter ton rythme, j’ai choisi que tu dormes à côté de moi et je vais m’attarder sur ce dernier élément.

Nous dormons en cododo depuis ta naissance, ce qui fait de moi ta figure de réassurance la nuit, ton doudou, ta tétine, ta sécurité, ton garde-manger c’est-à-dire le summum du don de soi.

Les premiers mois, j’ai entendu chaque petit bruit, chaque petite pause respiratoire, chaque mouvement, oui en gros je n’ai pas tellement dormi ; l’hypervigilance qu’ils appellent ça… Puis les nuits passent, tu grandis, tu prends des forces (et de la place), je cumule la fatigue aussi, les mois  s’écoulent et tu te déplaces. Cela facilite les choses car maintenant tu viens te servir, « open bar ».

Parfois je suis tellement fatiguée que je ne me rappelle même plus de ce qui s’est passé : tu es vivante, ta couche est pleine, ouf ! Et en fait ça ce sont les « bonnes » nuits, celles où mon cerveau arrive apparemment à déconnecter quelques instants, car les autres peuvent être difficiles. Lorsque tu as eu une dure journée, que tu as besoin de décharger ton stress la nuit, je suis là.

Lorsque tu es malade, que tu as de la fièvre ou que tes dents pointent, je suis là. Lorsque des angoisses émergent et que le moindre centimètre qui nous sépare te paraît être un cratère, je suis là. Lorsque tes premiers cauchemars apparaissent, je suis là.


Les premiers mois, j’ai entendu chaque petit bruit, chaque petite pause respiratoire, chaque mouvement, oui en gros je n’ai pas tellement dormi ; l’hypervigilance qu’ils appellent ça…


Bon j’avoue que je me fais un peu mousser là, parce que la vérité serait plutôt : mon sein est là. D’ailleurs je profite de cet écrit pour remercier tous les Dieux et Mère Nature de m’avoir dotée de seins et de tétons en béton armé.

Ce sont tellement d’heures de bonheur intense (ocytocine bonjour !), de pleurs (prolactine et fatigue merci !), de douleurs physiques (les positions d’allaitement sont ergonomiques lorsqu’elles sont tenues 1 h max hein), de complicité… Bref, toutes ces nuits où je veille sur toi comme en plein jour, tous ces doutes sur l’allaitement qui apparaissent à chaque régression de ton fragile sommeil et qui aussitôt sont calmés par tes progressions. Toutes ces nuits qui m’ont appris qu’une mère ne dort jamais. Car oui ma chérie, depuis que tu es née je n’ai plus de nuit, lorsque le soleil se couche et que la lumière de la lune apparaît ce n’est que la continuité de la journée pour moi.

La vérité est qu’en m’enlevant mes nuits tu as éclairé ma vie.


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